A PROPOS DE L'HISTOIRE DES CORPS REPRESENTATIFS ET DES PARLEMENTS

par Nikola Radojčić

Au nombre des tâches les plus urgentes et les plus importantes de l'historiographie mondiale figure l'étude scientifique du développement des corps représentatifs et des parlements. Il n'est pas nécessaire en effet de démontrer dans les détails son importance pour la connaissance du passé et la compréhension du présent. Aussi il ne nous est pas facile d'avouer ouvertement que la science a négligé l'étude des origines, du développement et des nombreuses et profondes influences des corps représentatifs sur la vie des peuples et des États. Bien plus, une bonne partie des études historiques des corps représentatifs et des parlements dont nous disposons à l'heure actuelle ne saurait nous satisfaire au point de vue scientifique. D'où cela provient-il ?

Tout d'abord, l'étude du développement des corps représentatifs et des parlements est par elle-même déjà une tâche difficile et exige une connaissance approfondie de l'histoire nationale et universelle, car l'évolution des institutions représentatives et parlementaires de chaque peuple et de chaque État ne peut être étudiée avec succès que sur la base d'une compréhension pénétrante et intelligente des institutions similaires dans le monde et le passé commun de l'humanité. Ensuite, les recherches sur les institutions représentatives et parlementaires requièrent une connaissance à la fois historique et juridique, étayée de préférence par un sens politique avisé. Il est rare de réunir toutes ces qualités et il ne faut pas perdre de vue combien il est difficile de réussir judicieusement et fructueusement dans l'application de la méthode juridique et historique à l'étude de telles institutions. Enfin, dans l'histoire des corps représentatifs et parlementaires s'introduisent trop souvent tant de conceptions erronées et tendancieuses qu'il devient très difficile de pénétrer jusqu'au cœur de la vérité historique à travers la croûte épaisse des erreurs et des représentations sciemment faussées.

Les prémisses de toute réussite scientifique consistent dans une vue nette de la réalité. C'est ce qui a été affirmé touchant l'histoire des corps représentatifs et des parlements au VIIe Congrès international des sciences historiques de Varsovie, le 22 août 1933, lorsque fut soulignée l'importance d'une collaboration, internationale pour l'étude de l'évolution des assemblées représentatives et souveraines. On décida alors de créer une commission permanente avec une mission déterminée au sein du Comité des sciences historiques, qui, on ne l'ignore pas, édite son excellent Bulletin of the International Committee of Historical Sciences où sont reproduites les conclusions susmentionnées (V, 1, 1933, 85-86). Des experts de 8 pays faisaient partie de cette commission, et, le Comité international des sciences historiques a approuvé, au cours de sa session du 13 au 16 avril 1936 à Bucarest, avec enthousiasme, la constitution de cette commission appelée „Commission pour l'étude des origines des Assemblées d'États", changée plus tard en „Commission internationale pour l'histoire des Assemblées d'États". Tous ces plans étudiés, ainsi que les efforts laborieux qui les ont marqués, sont restés, je le crains, insuffisamment connus dans notre monde scientifique.


Les trois principaux objectifs de cette commission ne sont pas difficiles à atteindre: 1. réunir les collaborateurs des différents pays; 2. déterminer provisoirement mais avec suffisamment de clarté l'objet des études; 3. découvrir les moyens de les développer. A la vеille de la Seconde guerre mondiale, la commission, comptait 26 membres représentant 12 pays. Le nôtre, malheureusement, n'y figurait pas. Ses tâches principales étaient réparties de la manière suivante: composer une bibliographie analytique internationale, s'appliquer à faire des éditions critiques des sources (concernant naturellement l'histoire des assemblées), unifier la terminologie et perfectionner la méthode des monographies consacrées aux origines et au développement des assemblées d'États, promouvoir non seulement la rédaction de pareilles monographies mais aussi d'études synthétiques et de travaux comparatifs touchant ces assemblées. On s'en rend compte: les tâches ne manquent ni d'ampleur ni d'ambition, sans se perdre pour autant dans la nébulosité, les résultats acquis le prouvent à suffisance.

Le travail d'organisation qu'il convient d'apprécier grandement parce qu'il est le fondement et la garantie du succès, est effectué par les Congrès nationaux et internationaux des historiens et par une rencontre des spécialistes de l'histoire du droit. De plus, grand nombre de chercheurs sont des juristes de profession.Toutes ces initiatives se sont déployées sans nous et cela par notre faute. La Commission a fait remarquer avec pertinence que le succès sera le plus sûrement assuré, pour ce qui concerne les efforts du début, par les sections nationales et par la collaboration avec des institutions au programme desquelles figure l'étude de l'évolution des assemblées d'États, comme par exemple la Médiéval Academy of America et American Historical Association. Le premier comité national fut fondé en France et le comité irlandais s'est révélé dès le début particulièrement actif.

Au IXe Congrès international des Sciences historiques, on put assister au sein de la Section VII, Histoire des assemblées d'États, à une série imposante d'exposés touchant l'histoire des corps représentatifs et des parlements, ce qui témoigne autant de la bonne compréhension des tâches que des efforts et des succès scientifiques.

La direction des comités pour l'étude historique des assemblées et des parlements est actuellement assurée par: la présidente Helen M. Cam, professeur émérite de Harvard, excellente spécialiste du développement constitutionnel anglais ; le vice-président P. S. Leicht de l'université de Rome, le très méritant chercheur des sources pour l'histoire des assemblées en Italie et évidemment excellent expert pour l'étude de leur évolutioн ; le secrétaire Emile Lousse comme il se doit l'âme de toute la commission à l'heure actuelle sans aucun doute un des plus consciencieux experts, doué d'une érudition universelle dans le domaine de l'histoire des assemblées, professeur à l'Université de Louvain; le trésorier est J. Lejeune, professeur à l'Universit de Liège, un autre Belge, qui connaît parfaitement le développement des institutions juridiques de son pays.

A notre connaissance, parmi toutes les sections nationales de la Commission internationale, deux se distinguent tout particulièrement: celle de Belgique et celle des Etats-Unis. Tandis que je rédige ces notes j'ai devant moi sept volumes remarquablement soignés de la section belge de la. Commission internationale pour l'histoire des assemblées d'États. Ils sont édités en français et eu néerlandais nous le titre: Anciens Pays et Assemblées d'Etats — Standen en Landen, I, 1950; II, 1951; III-IV. 1952; V -VI, 1953 et VII, 1954. Ces travaux traitent surtout des corps représentatifs et parlementaires belges, très intéressants et pleins d'enseignements pour l'institution des assemblées d'États en général. L'influence de la Constitution belge sur le développement des constitutions modernes n'a pas besoin d'être démontrée ni discutée ici. Par contre, il est indispensable et fondamental, pour la compréhension des exposés publiés de suivre les étapes par lesquelles a passé l'actuelle constitution belge au cours de son développement. Les Belges ne sont pas seulement désireux d'enseigner, mais ils désirent également apprendre. Aussi, les membres de la section belge soulignent surtout qu'ils laissent dans leurs éditions une place aux études historiques concernant les assemblées d'autres États. Je dois signaler tout spécialement qu'en Belgique l'intérêt scientifique pour l'évolution des assemblées est si vif et si fécond tout à la fois, que les études à ce sujet ne se trouvent pas seulement dans les dites éditions mais aussi dans d'autres publications belges et internationales.

De cette collection ”Anciens Pays et Assemblées d'États — Standen en Landen” je me contenterai de citer un extrait susceptible, à notre sens, d'intéresser nos lecteurs, en m'empressant toutefois de préciser que cela ne signifie nullement que les autres ne seraient pas dignes d'être mentionnés:

Vol. I: Dhoudt Jan, Les origines des Etats de Flandre, 1-52; Buntinx J., De Raad van Vlaanderen (1386-1795) en zijn Archief, 55-76; je mentionne comme spécialement instructive pour nous l'étude de Scufflaire Andrée, Les Serments d'inauguration des comtes de Hainaut (1272-1427), 79-132; elle est écrite sur la base d'un abondant matériel d'archives, mais aussi d'une littérature judicieusement choisie. Cette étude constitue un apport très enrichissant pour la question très complexe du serment d'inauguration des comtes. (Je ne puis pas omettre de mentionner l'étude de B. Wilkinson: The Coronation Oath of Edward II and the Statute of York, Speculum; XIX, 1944, 445-469).

Vol. II: Bergen Didier, Bürgerrecht in Stad en Land onder het Ancien Régime. Het verwerven van het Bürgerrecht te Tienen, 1-65; Bocage Colette, Les États de Hainaut (Des origines à la Maison de Bourgogne), 67-77; particulièrement instructive se révèle la revue bibliographique de R. Petit, dans laquelle sont signalées les œuvres concernant les corps représentatifs belges, néerlandais et irlandais, 79-122.

Vol. III: Lejeune Jean, À propos de l'Art mosan... Renier l'Orfèvre et les fonts de Notre-Dame, 1-27, qui constitue un excellent témoignage de l'ampleur des conceptions scientifiques de la section belge; Favauge Jacques, La publication de la Sentence synodale liégeoise de 1204, 28-66; Rezsohazy Rodolphe, Les Assemblées d'États dans le Royaume de Serbie au moyen âge, 127-132, écrit sur la base de mon ouvrage Srpski drzavni sabori u srednjem veku (Les Assemblées d'États serbes au moyen âge, 1940).

Vol. IV: Verlinden Charles, Twee Document en over Prijzen en Lonen voor Vlaanderen en Gent (1588), 103-133.

Vol. V: Lode Wils, De werking van de Staten van Brabant, omstreeks 1550-1650, volgens Leuvense Archiefbromien, 1-19; Lefèvre Joseph, Le Gouvernement du Comté de Bainaut au XVIIIe siècle, 21-47; Préaux-Stoquart C, Les Finances des États de Sainaut au XVIIIe siècle d'après la Jointe des Administrations et des Affaires de Subsides, 49-109;
Petit Roger, La formation du Pays de Luxembourg, 111-119.

Vol. VI: Gorissen Pieter, De Prelaten van Brabant onder Karel V (1515-1544). Hun Confederatie (1534-1544), 1-127.

Vol. VII : Balon Joseph, Les Fondements du Régime foncier au Moyen Âge depuis la chute de l'Empire romain en Occident. Étude de Dogmatique et d'Histoire du Droit, 1-198. La liste des sources ci-jointes et la littérature sont minutieusement établies. A la fin de ce volume, on trouve une table des matières très précieuse de toutes les Études présentées à la Commission internationale pour l'histoire des Assemblées d'États. Elle est précédée de la liste des membres de la Commission. Le nombre des études publiées est si grand qu'il représente trois pages de texte imprimé en petits caractères. Aussi dois-je me résigner à ne pas les mentionner ici. Je ferai cependant exception pour les deux derniers numéros XVI et XVII.

Le volume XVI sera édité avec des subsides de l'UNESCO Expeditio Billarum Antiquitus et le Volume XVII seulement annoncé est Médiéval Représentation in Theory and Practice: Essays by American Members of the International Commission for the History of Représentative and Parliamentary Institutions (Numéro spécial de Speculum).

La promesse est déjà tenue et la première partie de cette publication périodique rénommée Speculum (XXIX, n° 2- Part. 2, April 1954) représente aujourd'hui une des plus précieuses collections des études pour l'histoire des Assemblées d'États et des corps représentatifs en général.

Il existe sept recueils, précédés d'une introduction de Helen M. Cam, où elle présente le résumé et les résultats nouveaux des recueils publiés, en connexion avec les études précédentes dans le même domaine. Quoique très courte (347-355), cette introduction est pleine d'aspects intéressants et scientifiques et contient de judicieuses exhortations en vue de nouvelles recherches — en partant des diverses conceptions philosophiques et juridiques de la notion même de „représentation", pour passer aux différentes formes de représentation, leurs façons de délibérer et de prendre des décisions, de la mise en pratique de leur théorie et de leur influence des faits sur la création des théories, etc.

Des différents travaux publiés, je me bornerai à citer spécialement Hoyt Robert S., Recent Publications in the United States and Canada on the History of Western Representative Institutions before the French Revolution (356-377). Avec beaucoup d'indépendance, l'auteur s'est contenté uniquement de faire état des compléments américains et canadiens pour l'étude des corps représentatifs, mais en considération de leur nombre et du sérieux de l'effort scientifique, on peut déduire avec combien de sympathie et de compétence, il a traité ce problème si important. Cependant, le second alinéa de cet essai commence comme suit: „Perhaps the most striking characteristic of this literature, taken as a whole, has been a reluctance to view the subject in larger terms. No book has appeared whose scope even nearly coincides with the title of this paper, nor has any work attempted a general synthesis of the subject for either the mediaeval or the early modern period. Another, and perhaps more illuminating way to characterize American scholarship on this subject is to say that representative institutions and related problems have not seemed appropriate as the generai frame within which history should be written" (356). Plus incisif encore est le début du second chapitre qui traite du Parlement anglais au moyen âge: „Eighty years after Stubbs inaugurated the modern study of mediaeval English constitutional history, it is still true that the history of parliament remains to be written. And yet it might be urged that Professor Plucknett's graphic dictum—„no English institution has been studied with such ardor, and with so little definite result, as parliament"—if seriously argued, would become (to quote other words of his) a „paradox brilliantly sustained" (358).


Cela ne signifie pas pour autant qu'il faut déposer les armes devant les difficultés de la tâche, mais qu'il faut continuer ce qui a été réalisé avec beaucoup de mérites depuis des dizaines d'années déjà: élaborer des études spéciales, qui seules peuvent garantir d'écrire une histoire du parlement anglais digne de son passé. Ce n'est pas l'endroit d'entrer dans tous les détails du développement du parlement anglais au moyen âge. On peut en trouver en notes la bibliographie nécessaire. Mais je crois devoir signaler que certaines d'entre elles concernent également les assemblées serbes au moyen âge.

Cette inférence des problèmes est encore davantage mise en lumière dans le second essai de cette collection, qui traite du droit coutumier: Ault Warren. O., Village By-laws by Common Consent (378-394). Si dans l'Angleterre médiévale, à côté de tant villes, le village est considéré comme la base de l'organisation sociale, il en va à fortiori de même pour les pays serbes. Aussi, cette étude est-elle très instructive pour le développement de notre droit coutumier. Les deux études suivantes ont trait à des problèmes plus spéciaux — intéressants d'ailleurs — que je ne signalerai pas, me contentant de souligner la cinquième de ce recueil: Post Gaines, The Two Laws and the Statute of York (417-432). On souligne souvent, dans ce traité, l'importance de ce statut, et on reconnaît avec beaucoup de franchise combien sont différentes les conceptions touchant les expressions les plus difficiles qu'on retrouve dans ce fameux document. Toutefois, ce n'est pas à cause de ces différences d'interprétation, mais à cause đe l'influence probable des lois romaines et canoniques sur le contenu et l'esprit du statut. J'insiste avec beaucoup de force sur la profondeur de l'influence du droit romain sur le développement du vieux droit serbe. C'est pourquoi, j'attire l'attention sur la même influence dans le développement de toutes les jeunes nations européennes. Les deux derniers essais concernent les corps représentatifs français dans lesquels — comme partout ailleurs dans ce recueil — on met en relief la différence dans l'évolution respective du parlement français et anglais. Isi encore, on trouvera à la fin du recueil, la bibliographie soumise à la Commission internationale pour l'histoire des Assemblées d'États.

L'importance de l'institution de l'Assemblée dans les pays serbes du moyen âge et surtout l'importance du rôle de l'Assemblée dans le développement de la Serbie moderne nous imposent impérieusement de rechercher le développement et le rôle de tout corps représentatif dans notre passé, en nous basant sur toutes les sources historiques accessibles et en effectuant des comparaisons avec le développement de toute assemblée d'État. Je me suis appliqué à suivre cette règle pour l'étude des assemblées d'État serbes au moyen âge et M. Dinić a fait de même pour les assemblées d'état de la Bosnie médiévale. Son ouvrage sera publié prochainement dans la collection de l'Académie Serbe des Sciences (Srpska Akademija Nauka). La tâche scientifique la plus urgente à l'heure actuelle est d'entreprendre l'étude du développement de toutes les variétés de corps représentatifs à Zêta au moyen âge.

La fin de l'indépendante de l'État serbe au moyen âge n'a pas entraîné la disparition de l'institution de l'Assemblée chez les Serbes. Dans des conditions modifiées, elle a continué à jouer un rôle dans la vie des Serbes, en s'accommodant, avec autant d'adresse que d'obstination, aux circonstances nouvelles. Nous avons la chance de disposer, pour l'histoire de l'Assemblée chez les Serbes sous la domination étrangère, d'une importante quantité de sources. En marge du pouvoir des Turcs, des Vénitiens et des Autrichiens, nous avons conservé nos assemblées nationales, régionales, départementales, voire tribales.


Ces différentes institutions attendent une étude scientifique digne du rôle eminent et diversifié qu'elles ont joué dans notre histoire. A l'appui de ce que je viens d'avancer, je me permets de solliciter l'attention du lecteur pour un traité récemment publié concernant l'histoire du Monténégro: Stanojević Gligor, Crna Gora u doba Kandiskog rata, 1645-1669 (Le Monténégro à l'époque de la guerre de Candie), Istoriski glasnik, 1-2 (1952) 3-53. Dans cette étude, pour la courte période qu'elle embrasse, il est fait état de différentes assemblées représentatives de régions, de départements ou de tribus (pp. 25, 27, 32, 35-36 et 41-42). Chaque fois qu'il en est fait mention, on signale en même temps, pour en faire valoir le caractère à la fois impératif et souverain, que la décision était prise à l'assemblée. Je ne veux pas omettre de rappeler que les décisions de l'assemblée étaient si influentes qu'on a même inventé des assemblées pour accroître encore l'importance de prétendues décisions.

De toutes les assemblées des Serbes à l'époque moderne, les matériaux les plus abondants qui ont été publiés concernent l'assemblée laïco-ecclésiastique serbe de l'archevêché de Karlovci. Seulement ni le nombre ni la valeur scientifique des études écrites concernant les assemblées laïco-ecclésiastiques serbes ne correspondent à l'abondance des matériaux publiés. Ceci est une constatation nullement une reproche, car on ne peut passer sous silence le fait que l'étude des assemblées laïco-ecclésiastiques présente un des problèmes les plus difficiles de notre historiographie. Ces organismes se sont, en effet, développés sous des influences si nombreuses et si puissantes que le fil conducteur du développement est difficile à démêler et à interpréter avec clarté. La base de la publication systématique du matériel pour l'histoire de ces assemblées est constituée de publications concernant certaines assemblées avec le compte-rendu de leurs discussions. On trouve des documents d'une autre espèce dans les archives de l'État à Vienne. Ils sont partiellement publiés: Kirilović D., Srpski narodni sabori, I, 1861-1875 (Les assemblées nationales serbes) et II, 1875-1891 (1938) ; il existe encore beaucoup d'autres archives.

Le développement historique des assemblées nationales de la Serbie moderne figure parmi les sujets qui s'imposent avec urgence et dont les résultats seraient des plus avantageux. Lorsqu'on songe à l'importance et à l'abondance relatives des sources, il est vraiment étonnant qu'on n'ait, jusqu'à présent, pas encore entrepris leur étude méthodique et scientifique. Des descriptions fragmentaires et des recueils superficiels ne peuvent qu'engendrer une représentation inexacte du développement de l'assemblée nationale dans la Serbie moderne.

La Commission internationale pour l'histoire des Assemblées d'États a dirigé jusqu'à présent, comme il apparait des études sus-mentionnées, tout spécialement son attention sur le moyen âge. Mais cet objectif actuel constitue déjà un élargissement du plan conçu au départ, qui était d'étudier les origines des Assemblées d'États. Chez les peuples occidentaux, l'étude des corps représentatifs et parlementaires a déjà pénétré bien avant dans l'époque moderne, sans entrer, il est vrai, dans des études plus analytiques de l'histoire des assemblées d'État au 19e et 20e siècle. Comme les temps modernes ont commencé pour les Serbes à la fin du XVIIe et au début du XVIIIe siècle, on trouve, en ce qui nous concerne, dans l'ordre du jour des commissions, l'étude des corps représentatifs et parlementaires à l'époque moderne et contemporaine. Nous disposons pour remplir cette tâche — outre les autres sources — des comptes-rendus des assemblées laïco-ecclésiastiques et des notes des assemblées de Serbie, du Monténégro, et de Bosnie et Herzégowine.

C 'est une conviction profonde de la Commission — qui ne se lasse pas de le souligner — que les racines du développement moderne des corps représentatifs et parlementaires sont profondément enracinées dans les institutions médiévales. Plus les études sont profondes, plus les faits se dégagent avec évidence. Et ce qui vaut pour l'Occident, peut sans doute s'appliquer également aux pays serbes. L'histoire des corps représentatifs et parlementaires ne peut être divisée en une histoire médiévale et moderne. Elle forme un tout et est scientifiquement indivisible. Il est également impossible d'isoler l'histoire des corps représentatifs et parlementaires d'un seul État et de l'étudier avec succès après l'avoir arbitrairement détachée. Seule peut être fructueuse une étude comparative entreprise sur un plan de collaboration internationale. À négliger un travail comparatif constant et vaste, on s'expose à un grand risque d'égarement, à de vaines pertes de temps tout comme on risque de succomber à la séduction de faux sentiers de recherches. C'est pourquoi, c'est uniquement au sein de la Commission internationale pour l'histoire des Assemblées d'États que l'étude de toutes les variétés d'assemblées peut être menée avec succès. Nous avons beaucoup à retenir des efforts déployés jusqu'à présent, mais pour les travaux comparatifs, nous sommes à même de fournir un matériel riche et de qualité. C 'est pour la réalisation de cet objectif élevé et scientifique que ces lignes sont écrites.



In: Anciens Pays et Assemblées d'États. 9 (1955) 138-146 (Trad. A. Vandeplas)